Syrian voices by Roza El-Hassan: des voix d’ici et d’ailleurs appellent à la résistance culturelle
La Syrie nous pose le problème essentiel et récurrent de l’intervention extérieure versus la non-intervention. L’une des raisons pour lesquelles cette alternative est ainsi considérée réside dans notre mémoire de la montée du nazisme en Allemagne et des crimes qui ont été commis à l’encontre de parties de la population. L’Occident n’est pas intervenu, a laissé les horreurs s’installer dans la normalité, y a participé parfois, et a contribué au déploiement de la deuxième guerre mondiale avant de finalement permettre sa fin. Quand les atrocités de la guerre civile en Syrie arrivent jusqu’à nous, portés notamment par le gaz Sarin, nous avons tendance à nous poser ainsi la question : intervention militaire, frappes – ou ne rien faire, et donc, laisser faire ? Mais dans la réalité l’alternative n’est pas si simple. L’intervention militaire comporte des risques importants – et il ne s’agit pas seulement de protéger nos petits conforts d’enfants gâtés qui ont grandi dans des presque paradis, non – il s’agit de protéger le monde. Et dans ce contexte, l’une des questions essentielles est celle de savoir comment intervenir autrement que par des « frappes » ? Par la négociation, la diplomatie – et la culture, aussi – une posture possible ?
© Amr Fayed (sans titre)
C’est en tous cas ce que suggère, entre autres, la chirurgienne humaniste lausannoise Marie-Christine Gailloud-Matthieu, quand elle invite l’artiste conceptuelle Roza El-Hassan, le juriste activiste des droits humains Shadi Al Shhadeh et l’historienne de l’art, spécialiste du monde arabe Charlotte Bank à la fois dans son cabinet – pour une exposition, comme elle le fait si souvent – et au Palais de Rumine, avec la complicité de Bernard Fibicher, le directeur du Musée cantonal des Beaux-Arts, pour une conférence-débat sur le rôle de la culture comme potentiel de résistance dans un pays en guerre. L’art en effet, en tant que tel, est (presque) toujours une forme de résistance. Résister, en théorie deleuzienne, c’est libérer la vie, l’amplifier, la déployer, au contraire de l’emprisonner ou la réduire. Pascal Quignard, lui, appelle les artistes « les meurtriers de la mort ». Donc oui, l’art et la culture, sous toutes leurs formes, contribuent à la Résistance contre la violence et l’horreur, en l’occurrence, celles de la guerre civile, la pire de toutes, ne serait-ce qu’en nous donnant à voir certaines réalités – et certaines illusions, aussi – autrement que ne le font les medias classiques. A suivre donc, car regarder ceux qui essaient de résister, qui travaillent à résister, c’est aussi, ne serait-ce que a minima, participer à la résistance.
Conférence au Palais de Rumine le 2 octobre à 18h30, Salle du Sénat (entrée libre)
Vernissage et exposition : tous les détails sur www.chirurgieplastique.ch/expositions
Publié dans Les Quotidiennes le 25 septembre 2013